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Le stockage géologique dans l'argile

Stocker des déchets radioactifs dans un sous-sol d'argile

Le SCK CEN est un pionnier dans la recherche pour stocker ces déchets dans des couches d'argile profondes. Aujourd'hui, il étudie les différentes options de concert avec l'ONDRAF et d'autres partenaires belges.

SCK CEN - Infrastructuur HADES (2019)

Le stockage géologique dans l'argile de Boom

Dans le laboratoire souterrain HADES, des experts développent et testent des technologies industrielles pour la construction, l’exploitation et la fermeture d’une installation de stockage dans l’argile. Des scientifiques y mènent des expériences dans des conditions « réelles » dans une couche argileuse profonde, à grande échelle et à long terme, afin d’évaluer la sûreté du stockage en profondeur dans de l’argile peu indurée.

Quarante ans de recherche démontrent qu'une telle installation de stockage peut être excavée de manière industrielle et que la sûreté à long terme peut être assurée. La radioactivité qui serait libérée de la couche d'argile en concentrations très diluées après des milliers d'années n'a aucun impact sur l'homme ou l'environnement.

💡 Vous voulez en savoir plus sur HADES ? Plongez à 225 mètres sous terre et lisez la suite ici.

  • 2022_SCKCEN-EURIDICE_PatrickBrull-SetphanieVanVyve-1

    Quel rôle joue le laboratoire souterrain HADES ? -Partie 1/2

    Dans ce premier podcast, Christophe Depaus, ingénieur à l’ONDRAF, s’entretient avec les acteurs Stéphanie Van Vyve et Patrick Brüll sur l’objectif de HADES : démontrer qu’on peut garantir la faisabilité d’un stockage géologique des déchets radioactifs et sa sûreté sur des milliers d’années. Un entretien à la fois technique, philosophique et éthique.

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    Le stockage géologique, la seule solution ? - Partie 2/2

    Dans ce second podcast, Christophe Depaus, Stéphanie Van Vyve et Patrick Brüll vous font découvrir les propriétés de l’argile, le concept de l’installation de stockage et les expériences menées dans HADES. Le stockage est-il la seule solution techniquement et socialement réalisable ? Et quel rôle joue le temps ?

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L'argile se prête-elle bien au stockage géologique ?

May Awarkeh, géotechnicienne, expose les trois propriétés essentielles de l’argile qui en font une roche hôte idéale pour les déchets radioactifs.

Les expériences menées dans le laboratoire souterrain HADES montrent que l'argile possède de bonnes propriétés pour confiner les déchets radioactifs. Tout d’abord, l’argile présente une très faible perméabilité alors il ne laisse presque pas passer l’eau. Aucun écoulement d’eau ne pourrait y déplacer rapidement les substances radioactives. De plus, l'argile est plastique, ce qui signifie que les fissures qui se forment dans l'argile pendant l'excavation des tunnels se referment d'elles-mêmes après la pose d’une paroi en béton. Enfin, les minéraux d’argile, les plus petites composantes de l'argile, ont la propriété de fixer une grande partie des substances radioactives. Par conséquent, ils restent piégés dans la couche d'argile lorsqu'ils sont libérés, à long terme, de l'emballage qui renferme les déchets. Ces trois propriétés réunies font de l'argile un matériau adapté au stockage géologique.

Est-ce que le stockage géologique revient à créer une décharge souterraine ?

Sébastien Caes, chimiste, explique que le système géologique multi-barrières est bien différent d’une décharge souterraine.

Une « décharge », cela fait penser à un endroit où abandonner et oublier les déchets, sans se soucier de leur impact sur l'environnement. Ce n'est pas du tout le cas du stockage géologique. Ce système de stockage, tel qu’on le conçoit actuellement, est le fruit de quarante ans de recherche dans le laboratoire souterrain HADES à Mol. C'est l'option la plus sûre pour protéger les hommes et l'environnement des effets nocifs de ces déchets, grâce à une série de barrières. Dans un premier temps, les déchets seront emballés dans divers matériaux qui assureront leur confinement pendant des dizaines de milliers d'années. C’est ce que nous appelons les barrières ouvragées. Les déchets emballés seront soigneusement placés dans des tunnels horizontaux construits de manière à perturber le moins possible la couche géologique qui les entoure. Cette couche géologique constitue la barrière naturelle. Longtemps après que les barrières ouvragées auront cessé de remplir leur fonction, la couche géologique assurera encore un ralentissement considérable du mouvement des substances radioactives de sorte que lorsqu’elles atteindront (in fine) les limites de la couche géologique, leur concentration en radionucléides aura fortement diminué et leur radioactivité aura baissé. Elles ne présenteront alors plus de danger pour la population ou l'environnement

C'est quand même quelque chose de très différent d’une décharge souterraine.

    Ne serait-il pas préférable d’attendre de nouvelles technologies telles que la transmutation des déchets radioactifs ?

    Sébastien Caes, chimiste, raconte que même si la transmutation était utilisée, il resterait un volume important de déchets de longue durée de vie. Il souligne également pourquoi ce n’est pas souhaitable de repousser le problème des déchets dans le futur.

    Littéralement, « transmutation » signifie « transformation ». Il s’agit en l'occurrence de transformer certains éléments radioactifs de longue durée de vie en d'autres éléments radioactifs dont la durée de vie est plus courte. Les recherches en cours sur la transmutation pourraient permettre à l'avenir de réduire le volume des déchets hautement radioactifs. Toutefois, rien ne changera pour les déchets actuels qui ont déjà été traités. Même si nous appliquons la transmutation, il reste un volume important de déchets de longue durée de vie, qu'il faut isoler à long terme de l'homme et de l'environnement. Le stockage géologique est la solution la plus sûre à cet effet. La transmutation n'est donc pas une alternative, mais elle peut avoir une valeur ajoutée à l'avenir et conduire à une optimisation du système de stockage.

    Plus généralement, nous ne pensons pas qu'il soit responsable d'attendre une nouvelle technologie qui pourrait ne jamais voir le jour. Nous ne ferions que reporter le problème. La réalisation d'une installation de stockage prend des décennies. Si des solutions différentes ou plus efficaces apparaissent entretemps, elles seront évidemment prises en compte.

    Les changements climatiques constituent-ils une menace pour une installation de stockage géologique ?

    Delphine Durce, chimiste, analyse pourquoi les changements climatiques sont précisément un argument en faveur du stockage géologique.

    Non, au contraire. Les changements climatiques constituent un autre argument de poids en faveur d’une installation de stockage géologique.

    Aujourd'hui, il est surtout question de réchauffement climatique. Si, à long terme, toute la glace sur Terre devait fondre, le niveau de la mer s'élèverait de plusieurs dizaines de mètres. Une partie de la Belgique pourrait alors se trouver sous l’eau. Dans une telle situation, La vulnérabilité de l’entreposage des déchets dans des bâtiments en surface est donc claire. A l’inverse, en profondeur, les déchets restent confinés et isolés de ces changements.

    À très long terme, c'est-à-dire sur les centaines de milliers d'années à venir, les chercheurs s'intéressent plutôt à l'influence des périodes glaciaires. Les ères glaciaires et les intervalles plus chauds comme celui que nous vivons actuellement alternent tous les cent mille ans environ. Dans nos régions, une ère glaciaire induit surtout des températures plus froides, l'apparition de permafrost et éventuellement l’incision des rivières. C'est également pour cette raison qu'une installation de stockage sera construite à plusieurs centaines de mètres de profondeur, afin que ces perturbations n'en affectent pas la sûreté.

    Le stockage rend-il nos eaux souterraines impropres à la consommation ?

    Delphine Durce, chimiste, vous explique pourquoi les expériences menées dans le laboratoire HADES excluent ce risque.

    Non. Il s’agit d’ailleurs de l'une des exigences de sûreté pour le stockage géologique.

    La radioactivité des déchets diminue avec le temps, bien que pour certaines substances radioactives, cette diminution soit très lente. En confinant les déchets pendant des dizaines de milliers d'années dans leur emballage, la radioactivité aura déjà baissé au moment où les substances radioactives pénètreront dans l'argile. Leur mouvement sera ensuite fortement ralenti par les minéraux argileux, qui sont les plus petites particules de la couche d'argile et qui fixent une part importante des substances radioactives. De plus, la concentration des substances radioactives diminuera encore due à la dispersion dans l’argile. Grâce aux expériences menées à HADES, nous avons une bonne compréhension de ces processus et pouvons déterminer avec précision comment les substances radioactives se déplacent dans le sous-sol à long terme. La quantité de radioactivité qui sera libérée dans les eaux souterraines sera négligeable et ne présentera aucun danger pour les personnes qui utiliseraient cette eau à l'avenir.

    Un autre aspect est le réchauffement engendré par la présence de déchets hautement radioactifs. La répartition dans l’installation des déchets qui produisent de la chaleur s’effectuera de manière que le réchauffement des eaux souterraines reste limité et s'inscrive dans les normes légales.

    Le stockage ne rendra donc en aucun cas les eaux souterraines impropres à la consommation.

    Le stockage géologique est-il la seule option pour les déchets radioactifs de longue durée de vie ?

    Manuel Capouet, chimiste, vous explique pourquoi le facteur temps est essentiel et pourquoi le stockage géologique est considéré comme la solution la plus sûre.

    Les déchets radioactifs sont actuellement entreposés dans des bâtiments. C'est une situation sûre. Mais la durée de vie d'un bâtiment est limitée, tandis que les déchets de longue durée de vie restent dangereux pour l'homme et l'environnement pendant des dizaines voire des centaines de milliers d'années. L’entreposage dans des bâtiments est impensable à cette échelle de temps.

    Au niveau international, le stockage géologique est considéré comme la solution la plus sûre. L'avantage du stockage géologique est que nous isolons les déchets en profondeur, dans un environnement stable depuis des millions d'années et qui le restera également pendant les centaines de milliers d'années à venir. Avec un tel système, l'intervention humaine n'est pas nécessaire pour garantir la sûreté, et nous ne transmettons pas le fardeau de la gestion des déchets aux générations futures. Les alternatives telles que le lancement dans l'espace, par exemple, sont exclues, entre autres, en raison des risques liés au lancement et des coûts élevés qu'il implique.

    Au niveau international, le stockage géologique est donc considéré comme la seule option de gestion à long terme des déchets radioactifs de longue durée de vie.

    Où une installation de stockage pourrait-elle être construite en Belgique ?

    Arnaud Dizier, géologue, vous présente les sous-sols envisageables et le processus de sélection du site.

    À l'heure actuelle, rien n'a encore été décidé quant à l'emplacement éventuel d'une future installation de stockage. L'endroit où elle POURRAIT être construite dépendra des caractéristiques du sous-sol et des exigences de sûreté définies par l'Agence fédérale de Contrôle nucléaire. Dans la partie nord de la Belgique, ce sont surtout les couches d'argile peu indurées qui sont envisagées. Dans la partie sud, il s’agit par exemple des argilites et des schistes.. L'endroit où l’installation SERA finalement construite, en plus des exigences de sûreté, dépendra également du résultat d'une concertation sociétale. On recherchera donc une région désireuse de devenir partenaire du développement d'un tel projet. Enfin, l'AFCN évaluera si la proposition concrète à un endroit donné répond à toutes les exigences de sûreté liées à une installation de stockage géologique.

    Quel serait l'impact d'un tremblement de terre sur une installation de stockage ?

    Arnaud Dizier, géologue, vous explique comment se produisent les tremblements de terre et où se situe le plus gros impact : en surface ou en profondeur ?

    Un tremblement de terre se produit lorsque deux blocs de roche du sous-sol se déplacent soudainement l'un par rapport à l'autre le long d'une ligne de faille. Cela provoque une vibration ou  séisme qui se propage dans le sous-sol. Les dommages les plus importants se produisent à la surface de la terre, où des vibrations supplémentaires sont générées au niveau du contact entre la terre ferme et l'air. Dans ce cas, il vaut mieux que les déchets soient stockés sous terre, dans une installation de stockage hermétiquement fermée.

    Les séismes qui se produisent en Belgique sont de faible intensité. Chez nous, les tremblements de terre proviennent généralement de zones de failles existantes et bien connues, comme celles du nord-est de la Belgique. Toute installation de stockage sera construite à une distance sûre de ces zones de failles connues. L'impact potentiel d'un séisme sur une installation de stockage souterraine est ainsi réduit au minimum absolu.

    Peut-on récupérer les déchets de l’installation de stockage ?

    Christophe Depaus, ingénieur, décrit les phases d’un stockage géologique au cours desquelles les déchets peuvent être récupérés.

    La construction du stockage et la mise en place de tous les déchets radioactifs prendront de nombreuses décennies. L’installation de stockage restera accessible pendant cette phase opérationnelle. La conception du l’installation de stockage et le design du superconteneur permet ensuite de récupérer les déchets pendant une certaine période. La durée exacte de cette période reste à déterminer. Avec la recherche à HADES sur la stabilité et le comportement du revêtement en béton, nous fournissons des données pour la conception d'un stockage qui rendra cela possible.

    À un moment donné, l’installation serait fermée afin de garantir la sûreté pour les générations futures sans que celles-ci aient à faire quoi que ce soit. C’est ce que l’on appelle la sûreté passive. Mais même alors, l’extraction des conteneurs situés à plusieurs centaines de mètres de profondeur, bien que moins aisée, ne sera jamais impossible.

    Nous pourrons donc effectivement récupérer les déchets, bien que cela devienne de plus en plus difficile au fil du temps.

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