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Utilisation des smartphones comme dosimètres post-accidentels

14 juillet '21

Les smartphones peuvent, lors d'incidents radiologiques, servir de « dosimètres ». En lisant les résistances qui les composent, les chercheurs peuvent a posteriori estimer avec précision la dose de rayonnement individuelle. C'est ce qui ressort d'une étude expérimentale réalisée à grande échelle par le SCK CEN. « Il est d'une importance capitale – en cas de doses élevées causées par une situation accidentelle – de prodiguer immédiatement une aide médicale», souligne Olivier Van Hoey, expert en dosimétrie au SCK CEN.

SCK CEN - Smartphones als ‘toevallige dosimeters’ (2021)

Dans le circuit électronique d'un smartphone se trouvent traditionnellement 10 à 20 résistances. Ces résistances contiennent de l’oxyde d'aluminium, une substance qui, dans certains dosimètres professionnels, mesure le rayonnement ionisant. « Lorsque nous sommes exposés à un rayonnement ionisant et que nous avons notre smartphone dans notre poche, ces résistances dans notre smartphone absorbent une partie de l'énergie du rayonnement. De cette manière, les électrons contenus dans cette matière s'élèvent à un niveau énergétique supérieur. En éclairant ensuite les résistances qui ont été soumises au rayonnement, les électrons retrouvent leur état énergétique d'origine et émettent une lumière visible. Ils indiquent ainsi la mesure de la dose de rayonnement. Plus il y a de lumière, plus le rayonnement est élevé », explique Olivier Van Hoey, expert en dosimétrie au SCK CEN.

SCK CEN - Smartphones als ‘toevallige dosimeters’ (2021)

Grâce à une étude expérimentale à grande échelle au cours de laquelle le SCK CEN a simulé un incident radiologique, le centre de recherche a testé la précision de cette technique très prometteuse. Au total, plus de 1500 résistances ont été lues. « La plus grande partie avait été irradiée au préalable, l'autre pas. Nous avons par ailleurs introduit des variantes sur le type de rayonnement, la dose totale de rayonnement et le délai entre l’irradiation et la lecture », précise O. Van Hoey. Les chercheurs ont ensuite tenté de reconstituer le scénario de l'incident par le biais des résistances. Ayant eux-mêmes fixé les paramètres, ils connaissent les doses qu'ils sont censés relever. Ce test a montré que la technique est extrêmement précise. « Des soins médicaux sont nécessaires à des doses de 1000 milligrays et plus. Grâce à cette technique, nous sommes capables de mesurer avec la plus grande précision des doses qui sont 10 fois inférieures. »

Plus il y a de lumière, plus le rayonnement est élevé.
Olivier Van Hoey, expert en dosimétrie au SCK CEN
SCK CEN - Smartphones als ‘toevallige dosimeters’ (2021)

Dose de rayonnement au niveau des organes

Les chercheurs ont mis au point leur expérience de manière à pouvoir identifier et repousser les limites de la technique. Olivier Van Hoey précise : « Avec les smartphones, nous ne disposons que d'un point de mesure sur l'ensemble du corps. De cette manière, nous ne recueillons pas immédiatement des informations sur les doses au niveau des organes, qui absorbent tous une dose différente. La façon dont ces doses sont corrélées dépend de la façon dont vous portez votre smartphone et dont vous vous tenez ou bougez. Votre smartphone se trouve-t-il dans votre poche gauche ou droite ? Tournez-vous le dos à la source de rayonnement ? Quel est l'angle d'incidence du rayonnement ? Perpendiculaire ou oblique ? »

Pour répondre à ces questions, les chercheurs du SCK CEN ont irradié des mannequins anthropomorphes qui possèdent une anatomie réaliste. Des smartphones étaient placés à différents endroits sur ces mannequins et différents dosimètres professionnels à l'intérieur de ceux-ci. O. Van Hoey : « Quelle dose avons-nous mesurée dans les résistances des smartphones ? Et quelles doses sont enregistrées par les dosimètres professionnels placés dans les organes ? De cette manière, nous avons pu établir la corrélation entre les deux. »

Suite de l'étude

Après un incident nucléaire, toute une logistique doit être mise en place. C'est une course contre la montre : collecter les smartphones, les démonter, lire les résistances ... Plus les résultats tardent à venir, plus le signal dans les résistances est faible. « Idéalement, les mesures doivent être réalisées directement après l’incident, mais c'est impossible dans les faits. La suite de l'étude doit par conséquent s'attacher à savoir à quelle vitesse le signal faiblit et de quelle manière des facteurs comme la température influencent ce processus », conclut Van Hoey. Les partenaires de l'étude souhaitent dresser une base de données digitale pour pouvoir convertir rapidement la dose contenue dans les résistances en une dose au niveau des organes.

L'association européenne de la dosimétrie EURADOS

Pour ce projet, le SCK CEN a travaillé en collaboration avec Public Health England (PHE) et Helmholtz Zentrum München (HMGU). Ils ont jeté toutes leurs expertises, connaissances et ressources humaines dans la recherche de la corrélation entre la dose mesurée dans les résistances, d'une part, et la dose absorbée par les organes, d'autre part. Ces trois institutions font partie de l'association européenne de la dosimétrie EURADOS (European Radiation Dosimetry Group), qui regroupe plus de 75 institutions européennes et 620 scientifiques.

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